« La colombe n’est pas le symbole de la paix, mais le signe de la présence de Dieu Esprit Saint ». Première de couverture de « Noyau d’olive », d’Erri de Luca
« Il devait y avoir quelque chose de spécial dans le timbre de voix de Iona pour que Dieu aille le choisir lui précisément, le plus récalcitrant, le plus rebelle de tous les prophètes de l’Histoire sainte. » Erri de Luca. Quatre pas avec Iona/ Jonas IN Noyau d’olive. Gallimard, 2012 (Folio), pp 97-98.
Le message de ce prophète est le plus court de toute la section des « Prophètes », dans l’Ancien Testament, puisqu’il se résume à un demi-verset. L’essentiel de son message est donc ailleurs, plus particulièrement dans sa personne et son comportement.
Voici une LECTURE SUIVIE DU LIVRE DU PROPHÈTE JONAS (2018), proposée par Louis-Michel, un ami et un frère pasteur qui me l’a aimablement transmise et autorisé à la publier ici, pour l’édification de chacun. Qu’il en soit remercié !
Base de l’étude : Thompson 21 / BS 21 (archéologie) / Bible McArthur / La Bible en BD (LLB) / Le Christ dans toutes les Écritures (Hodgkin) / Bible du Semeur / L’Ancien Testament Bridel 1872 / Les prophètes de l’A-T (P. de Benoit) / Jonah and Micah (J. Vernon McGee) / Old Testament Survey (P. Hammond) / Introduction à l’AT (G.L Archer) / Commentaire Biblique d’Emmaüs (CB) …
Première Remarque : La BS 21 propose une lecture à deux entrées, l’une qui serait historique, l’autre fictive (une légende avec une leçon spirituelle). Comme McGee et P. Hammond, je n’arrive pas à lire ce récit comme étant fictif … Ce texte annonce clairement, par avance, le rôle rédempteur de Jésus-Christ (ch.2), il se situe dans un contexte historique précis qui est la décadence de l’Empire dont Ninive était le flambeau. Même l’histoire du « grand poisson » est plausible, selon BS21 et d’autres spécialistes … Aucun doute chez GL Archer, H. Blocher, J-M Nicole, etc.
Seconde remarque : Le Livre de Jonas est de la plus haute importance puisqu’il a été mentionné par Jésus lui-même lorsque les religieux lui demandaient un signe. Jésus explique que CE SIGNE DE JONAS annonçait la mort et la résurrection du Messie (Matthieu 12 : 38-42). Il précise même que le SIGNE du « Fils de l’homme » pour cette génération était semblable à celui de Jonas pour sa génération (Luc 11 : 30) – (Y. I-Bing Cheng, entretienschrétiens.com).
Troisième remarque : Qu’est-ce qu’un SIGNE ? C’est la chose qui permet de comprendre le contenu d’un message. Quand nous voyons le signe « L’Eléphant Bleu », nous savons tous qu’il s’agit d’une station de lavage de voitures. Quand nous considérons Jonas, nous savons tous qu’il s’agit de la mort de Jésus et de sa résurrection.
JONAS 1 : 1-2
– La parole de l’Éternel fut adressée à Jonas, fils d’Amitthaï : On date ce récit dans la première moitié du 8ème siècle avant J-C (793-753 av.J-C). Le nom de Jonas signifie colombe(1). Celui de son père signifie fidèle. La colombe n’est pas le symbole de la paix(2), mais elle est le signe de la présence de Dieu Esprit Saint. Nous avons ici un père fidèle qui a engendré un fils vivant de l’Esprit de Dieu. N’est-ce pas une belle image de la transmission divine entre le Père céleste et Jésus le Fils, et entre les aînés et la jeune génération ? Dieu parle à Jonas car il a une mission à lui donner. Cette mission, on le verra, sera une bénédiction pour Ninive et pour Jonas lui-même.
– Lève-toi, va à Ninive … : Ninive a été la capitale de l’Empire assyrien dans les années 700 av. J-C, basée sur la rive est du Tigre à plus de 400 km de Babylone. Nahum l’a qualifiée de « ville sanguinaire » (3:1). Dans la ville, il y avait deux tertres dont un nommé « Prophète Jonas » (un tertre est un mémorial). La découverte du palais de Sanchérib a révélé la grandeur et le luxe de Ninive. C’est pour cela que Dieu la nomme « grande ville » (découverte de H. Layard en 1845). Pour parler à cette extraordinaire cité, le Seigneur a choisi Jonas. Il lui demande de SE LEVER pour se rendre à Ninive. Jonas devait être « assis », dans une position de stabilité, de confort, de routine. Tout allait bien. Sa vision concernait son peuple. D’un seul coup, l’Eternel lui demande l’impossible … aller chez les païens, les ennemis … (v.2a).
– … la grande ville, et crie contre elle, car sa méchanceté est montée jusqu’à moi » : L’auteur du récit (on ne le connait pas) révèle tout d’abord la méthode voulue par Dieu pour toucher le coeur des habitants de « la grande ville » : Jonas devra CRIER. Ensuite, on découvre le contenu qui sera de DÉNONCER LA MÉCHANCETÉ de Ninive. Lorsqu’on sert le Seigneur, il est important de comprendre ce qu’il attend de nous, dans la forme comme dans le contenu. L’expression « montée à moi » signifie que Dieu a vu, entendu, senti, et ressenti ce qu’il se passait à cet endroit parmi ses habitants. Dieu n’ignore rien de nos vies ! (v.2b).
JONAS 1 : 3-16
– Jonas se leva pour s’enfuir à Tarsis loin de la présence de l’Eternel : Il prend le bateau à Jaffa (nom signifiant « beauté », vers l’ouest, donc dans le sens opposé de Ninive). On ne sait pas de quelle Tarsis le livre de Jonas fait mention : Tarsis en Espagne (ce qui justifie le mot « loin », Tarsis en Sardaigne (selon un écrit phénicien), Tarsis au nord de l’Afrique (selon la version latine ce serait Carthage ou dans sa proximité), Tarsis en Anatolie (l’actuelle Turquie) ou tout simplement « en haute mer » (selon Saint Jérôme, père de l’Église). En fait, le lieu a peu d’importance, c’est le fait de s’enfuir loin de Dieu qui met Jonas en danger. Lorsque nous sortons de la présence de Dieu, nous prenons de gros risques ! (v.3).
– L’Eternel fit souffler sur la mer un vent impétueux : Ce vent se transforme en « grande tempête », le bateau part à la dérive et risque de « faire naufrage ». C’est Dieu qui dirige le vent. Il en est le créateur et l’utilise pour que sa volonté soit faite. Jonas pense fuir Dieu, mais Dieu le poursuit jusque sur la mer Méditerranée ! (v.4).
– Les marins eurent peur ; ils implorèrent chacun leur Dieu : C’est intéressant de voir comment ces marins sont terrorisés par la tempête. Comme ils sont religieux, ils prient. Aujourd’hui, des païens, des moqueurs, des blasphémateurs se mettent à prier Dieu quand les choses tournent mal … le coeur de l’homme est étonnant ! Les marins allègent leur navire pour essayer de le maintenir à flots. Pendant ce temps, Jonas « dormait profondément » au fond du bateau. Le capitaine le lui reproche car il veut que Jonas prie aussi son Dieu … qui sait ? L’homme en danger est prêt à essayer n’importe quelle religion ou superstition pour sauver sa propre vie ! (v.5-6).
– Puis ils se dirent l’un à l’autre : « Venez, tirons au sort … » : Le sort tomba sur Jonas ! Incroyable ! Dieu répond à la détresse des marins au sein de leur idolâtrie.
– Alors, ils lui dirent : « Dis-nous qui nous attire ce malheur » : On a du mal à imaginer ce dialogue au milieu d’une tempête, mais il est crucial pour les marins, ils jouent leur vie ! Le dialogue peut faire ressortir des choses intéressantes et peut permettre une guérison morale ou sociale. Le capitaine demande des comptes à Jonas sur son identité … (v.7-8).
– Il leur répondit … La réponse de Jonas est à peine croyable. Il est hébreu. Et il déclare « craindre l’Éternel ». En passant, il désigne son Dieu comme étant le Créateur, donc au-dessus des dieux des marins. Cette expression CRAINDRE signifiait qu’il rendait un culte à une divinité. Un repère social à cette époque (v.9). Puis, il leur explique qu’il est en train de fuir son Dieu … Ce que ses interlocuteurs ne comprennent pas. On ne défie pas une divinité … La peur saisit leur âme (v.10).
– Ils lui dirent : « Que te ferons-nous ? » … L’idée est d’éloigner la tempête et la mort, le jugement de ce Dieu de Jonas. Ils lui posent la question car Jonas s’est désigné lui-même coupable. La mer est en furie, il faut trouver une solution ! D’ailleurs, le prophète en propose une : de le jeter à la mer. Il est conscient de sa faute et accepte la mort comme châtiment (v.11-12).
– Ces hommes ramèrent pour gagner la terre ferme, mais ils ne purent pas y arriver : La mer est puissante lorsqu’elle est déchainée ! Les voiles ? Plus rien ! Les rames ? Comment quelques marins peuvent triompher d’une tempête meurtrière ? Impossible ! Alors, quelque chose d’extraordinaire se passe : l’équipage se met à prier le Dieu de Jonas ! Chacun le reconnait comme souverain (v.13-14).
– Puis ils prirent Jonas et le jetèrent dans la mer : Lorsque Jonas a reconnu sa faute, les marins auraient pu le jeter hors du navire, mais ils ont pardonné la faute. Seulement, là, ça ne suffisait pas. C’est pourquoi ils appliquent la parole de Jonas.Ils le condamnent à mort … Mais cela les chargeait terriblement. Dès que la mer est calmée, ils offrent un sacrifice, non pas à leurs dieux, mais à l’Éternel (v.15-16). Je me dis que Dieu est bon, il utilise la désobéissance de son prophète pour amener ces hommes à une rencontre avec Lui ! Le comble de Son amour ! Bien sûr, il n’est pas question de se laisser aller à faire n’importe quoi dans notre société, en pensant que Dieu va l’utiliser pour sauver les gens dans notre entourage !!! Il y a une autre leçon à apprendre pour Jonas et pour nous. En effet, le prophète rencontre des non-juifs, et à travers la tempête, Dieu l’humilie face à eux. Il se croit plus grand qu’eux, et cela ne peut pas être. On retrouvera cet état de coeur un peu plus tard lorsque Jonas reprochera à Dieu sa compassion à l’égard des Ninivites.
JONAS 2 : 1-11
– L’Éternel fit venir un grand poisson … La Bible Archéo dit qu’il s’agit, non d’une baleine (qui n’avale que des petits animaux marins), mais d’une GRANDE CRÉATURE MARINE. Le débat au sujet du poisson est bien animé par Satan qui voudrait bien nous faire oublier que c’est Dieu qui commande aux éléments naturels, et qui oriente les animaux selon Sa volonté. Il ne faut jamais oublier que les animaux, les végétaux, et les humains sont au service de Dieu.
– … pour avaler Jonas : Donc Jonas est resté entier, protégé de la noyade dans le « ventre » du poisson (Le texte ne parle pas de l’estomac – Le mot « ventre » est un terme employé au sens général).
– Jonas fut trois jours et trois nuits dans le ventre du poisson : Selon McArthur, il faut compter trois jours. C’est la culture hébraïque. Il s’agit d’un laps de temps d’environ trois jours. La connaissance de cette tradition permet d’effacer toutes les interprétations concernant les fameux trois jours entre la mort et la résurrection de Jésus. En tout cas, pour Jonas, ce fut certainement un temps bien difficile à vivre, un profond désespoir ! (v.1).
– Jonas, dans le ventre du poisson, pria l’Éternel son Dieu : Que fait-on quand tout va bien ? On oublie le Seigneur ! Et quand tout va mal ? On le prie ! Que nous sommes méchants !!! Mais ce qui est beau ici, c’est que Dieu a entendu Jonas. Il l’avait conduit dans le ventre de ce poisson, attendant un élan de son coeur d’homme perdu, une repentance … (v.2).
– Dans ma détresse, j’ai fait appel à l’Éternel, et il m’a répondu … On a l’impression de lire l’histoire de la relation entre Israël et son Dieu. Déjà, le prophète récalcitrant reconnait qu’il est en situation de détresse. Ensuite, il demande le secours à Dieu. Enfin, Dieu répond (pas seulement des mots, mais des actes !). Avec ce début de prière nous avons un texte digne du Livre des Psaumes.
– Du milieu du séjour des morts … Cette expression est à rapprocher des mots « Dans ma détresse ». En fait, Jonas fait face à la mort, elle est imminente.
– Tu as entendu ma voix : Répétition de « Il m’a répondu ». La première partie de ce verset fait partie du récit, la seconde est la prière à Dieu (v.3).
– Tu m’as jeté dans l’abîme, dans les profondeurs de la mer, et les courants m’ont environné ; toutes tes vagues et tes flots sont passés sur moi : Jonas reconnait la main de Dieu dans le jugement à son encontre (v.4).
– Je disais : « Je suis chassé loin de ton regard, mais je verrai encore ton Saint Temple » : Jonas se voit perdu, mais l’espérance de Dieu est toujours dans son coeur. Paul déclare que l’amour, la foi et l’espérance demeureront (1 Cor. 13) … Je crois qu’il y avait ces trois choses dans le coeur de Jonas, au-delà de son péché (v.5).
– L’eau m’a couvert … Jonas décrit la terreur que représentaient l’élément marin dans lequel il s’enfonçait, vers la mort … (v.6-7).
– Quand mon âme était abattue en moi … « Ô mon âme, pourquoi es-tu abattue en dedans de moi ? ». On reconnait l’Esprit des psaumes. N’avons-nous jamais vécu cette détresse de l’âme ? C’est ce ressenti profond qui pousse Jonas vers Dieu. C’est pourquoi, si nous sommes dans la dépression, ou dans le découragement, nous avons une grâce, nous sommes prêts à chercher l’Éternel ! (v.8).
– Ceux qui s’attachent à des idoles sans consistance : Il dit cela pour montrer la consistance de Dieu. En même temps, l’idolâtre peut comprendre son péché l’éloigne de Dieu (v.9).
– Quant à moi, je t’offrirai des sacrifices : Dans sa détresse, Jonas pense à ce qu’il donnera à Dieu lorsqu’il sera libéré. Ces sacrifices seront remplis de reconnaissance … Il faudra se rappeler de cet engagement quand nous lirons le dernier chapitre du Livre (v.10). La prière est courte mais puissante, violente, remplie d’espoir !
– L’Éternel parla au poisson : Dieu continue à diriger sa créature au bénéfice de son prophète. Le poisson vomit Jonas sur un rivage de la mer. On peut imaginer dans quel pitoyable état devait se trouver Jonas, mais sauvé (v.11) ! En effet, avec lui, nous pouvons proclamer « Le salut vient de l’Éternel » (v.10b) !
A suivre vendredi….
Notes :
(1) [Jonas = Iona, en hébreu]. C’est la même Iona qui a été envoyée par Noé depuis l’arche après le déluge, mais aussi le participe présent du verbe iana, opprimer.
(2) La colombe tenant un rameau d’olivier a été rendue célèbre en tant que symbole de la paix au XXe siècle à travers « la Colombe de la paix », dessinée par Picasso en 1949, à la demande du Parti Communiste dont il était membre. En même temps, l’Union soviétique préparait son premier essai nucléaire le 29 août 1949… Et puisque l’on parle de symbole, les LGBT, quant à eux, ont repris l’arc-en-ciel qui représente l’alliance avec Dieu.