« Débat sur le débat » : les questions que j’aimerai voir posées…

Débat du bois par Michael Meilen Vrai débat ou débat langue de bois ?

Débat du bois par Michael Meilen
Vrai débat ou débat langue de bois ?

« Débat » est un mot magique, qui semble incontournable dans nos sociétés démocratiques et médiatiques. Tellement incontournable qu’il a tendance à éclipser- un peu trop à mon goût- le terme de « discussion » ou de «dialogue».

De fait, l’intitulé (du moins sur le papier) de l’un de mes stages professionnels obtenus cette année, qui avait pour objet la place des médias dans le débat dit citoyen, m’avait justement paru très pertinent.

Le contenu du stage a-t-il répondu à mes attentes ? Malheureusement non. Il a plutôt (et souvent) été hors-sujet, même si j’ai pu relevé ici ou là quelques éléments intéressants.

Quelles sont les questions que j’aurai voulu voir aborder ?
Tout d’abord, que l’on commence par le commencement en questionnant sérieusement le terme « débat ».

Le débat : c’est quoi ? Entre qui ? Pour quoi ?

Microphone sans fil par Petr Kratochvil Le débat est-il connecté ou déconnecté de la réalité ?

Microphone sans fil par Petr Kratochvil
Le débat est-il connecté ou déconnecté de la réalité ?

Un sujet « qui fait débat », c’est quoi ? C’est ce qui nous engage tous, nous citoyens.

Quels sont les sujets « qui ne font jamais ou rarement débat » ? Par ex, le nucléaire, le choix d’une idéologie économique (le libéralisme) ou les conséquences du vote du « mariage pour tous »…

Comment choisit-on le sujet d’un débat ? Qui le choisit ? Dans quel but ?
Qui invite-t-on à « débattre » ?
Qui est le médiateur ?(un journaliste, par exemple ?) Quel est son rôle ?

Le médiateur doit connaître son sujet et avoir un but : éclairer, amener à comprendre et à se construire une « opinion éclairée ».

Le médiateur choisit des débatteurs, parce que lui, d’abord, « veut apprendre des choses » et permettre « d’apprendre des choses ».

Le médiateur choisit des débatteurs divers et de convictions diverses, qui ont réfléchit à la question posée, « qui fait débat » et ont des arguments (pour expliquer le fondement de leur conviction)

Le médiateur installe un climat de débat, basé sur l’écoute, le respect et le principe « je ne tiens pas à mes convictions, je tiens à la vérité… »

Le médiateur favorise un débat équitable et « éthiquable » : il pose de « bonnes questions »(des questions ouvertes, par exemple), bouscule l’un et l’autre débatteur, ne donne pas la primauté à une opinion sur une autre, cherche à déboucher sur une issue constructive. Il confronte les opinions(ne permet pas « d’esquive » de la part des débatteurs)et clarifie un terme trop jargonneux, par exemple.

Un médiateur doit-il, peut-il être « neutre » ?
Je ne crois pas vraiment à une neutralité absolue, mais attend à ce que le médiateur soit honnête.

Ce que le médiateur ne doit pas être : un « publiciste »(ou un « propagandiste »), un « passe-plat », un porte-parole d’une « opinion dominante »…Il aide à penser par soi-même et non dire ce qu’il faut(en)penser.

Lorsque le médiateur est un journaliste (sachant que « médiateur » commence comme « média », justement…), son rôle est d’expliquer, d’engager les gens à agir.

Celui ou celle qui assiste à un débat doit pouvoir se construire une opinion éclairée et être poussé à l’action, à l’engagement citoyen. L’on doit se dire à la fin du débat : « et maintenant ? Que fait-on ? »

L’exigence d’un débat de haute tenue est proportionnelle à la nature de l’engagement citoyen.

Le citoyen(c’est vous, c’est moi) a la responsabilité, notamment de s’informer sérieusement pour être en mesure de choisir, décider et prendre position.

Le citoyen(c’est vous, c’est moi) doit refuser le « faux débat », le « débat-spectacle » ou le « débat-bidon »(par exemple, celui où ne dominerait sur le plateau qu’un seul point de vue, avec des personnes-y compris celui qui est censé être modérateur- défendant une seule opinion) et détecter les « écrans de fumée » les sujets de diversion* et repérer les vrais enjeux.

Le citoyen (c’est vous, c’est moi) doit donc s’interroger positivement et acquérir des réflexes sur la façon de s’informer.

Autant de questions que je n’ai malheureusement pas vues abordées…..

Enfin, une question subsidiaire : le chrétien, celui qui « n’est pas du monde » (et notamment celui qui n’a pas la télévision, par exemple) doit-il se sentir concerné par le rôle des médias dans le débat citoyen et par l’éducation citoyenne ?  

Le sujet fait débat ! 😉

Une piste toutefois : le chrétien, s’il n’est pas du monde, est tout de même dans le monde (Jean 17v11-16). Et il est appelé à « éprouver toute chose »(1 Thes.5v21 ; Actes 17v10-11).

Bon débat !

Note :

*L’une des dix stratégies de la manipulation de masse implique « de détourner l’attention du public des problèmes importants et des mutations décidées par les élites politiques et économiques, grâce à un déluge continuel de distractions et d’informations insignifiantes. La stratégie de la diversion est également indispensable pour empêcher le public de s’intéresser aux connaissances essentielles, dans les domaines de la science, de l’économie, de la psychologie, de la neurobiologie, et de la cybernétique ».

De même, le documentariste Pierre Carles juge que le pouvoir (exercé par le présentateur du JT David Pujadas, qu’il dénonce) « ne consiste pas à dire aux téléspectateurs ce qu’ils doivent penser, mais à orienter leur perception du monde, par exemple en minimisant l’existence des conflits sociaux par une importance excessive accordée aux informations institutionnelles, aux résultats sportifs, aux faits divers, au « people »… Il ne cire pas ouvertement les pompes des dominants, mais écarte ou minore les informations susceptibles de les mettre dans l’embarras, comme la hausse des inégalités entre riches et pauvres, ou la misère économique, relationnelle et intellectuelle à laquelle le pouvoir condamne les sans-grades. C’est en ce sens qu’il détient une lourde responsabilité : non pas en télécommandant les gens, mais en occupant le terrain par des sujets futiles et en nous imposant un vocabulaire partisan ».